Laurent Puech : " l'immunité des travailleurs sociaux lanceurs d'alerte reste a créer"
Selon Larent Puech "Dans le secteur public ou privé, l'employeur a toujours plusieurs entrées possibles pour invoquer une faute, dont l'obligation de réserve. Mais finalement, le vrai risque est de figer dans le silence des professionnels qui ont des choses à dire sur le non-respect des missions des institutions..." TSL partage la même analyse que Laurent Puech l'immunité des travailleurs sociaux lanceurs d'alerte reste à créer. En effet, les travailleurs sociaux risquent de lourdes sanctions disciplinaires de leur direction ou administration voire de licenciement, dés lors qu'ils alertent les pouvoirs publics ou le grand public sur les dysfonctionnements entrainant une maltraitance institutionnelle et les dysfonctionnements de structure conduisant à exposer à un risque, voire à un danger, l'ensemble du public accueilli. Sans possibilité de dénoncer, on les abîme encore plus, il y a contamination de la maltraitance du public vers celle des travailleurs sociaux. Des membres de TSL, faute d'être entendu par leur hiérarchie ont osé dénoncé sur la place publique des maltraitances institutionnelles, certains d'entre eux subissent à ce jour des pressions et des humiliations constantes, certains sont mis au placard avec le risque d'un licenciement qui plane au dessus de leur tête.
Voici l'article bonne lecture
ASH - publié le 10 février 2017
Laurent Puech : " l'immunité des travailleurs sociaux lanceurs d'alerte reste a créer"
Alors qu'une éducatrice a été récemment mise à pied, dans l'attente d'une décision sur son licenciement, après avoir dénoncé les conditions d'accueil des mineurs isolés dans une structure gérée par l'association dont elle est salariée, Secretpro.fr (voir note) plaide pour le droit des professionnels à dénoncer les dysfonctionnements des institutions sur la place publique. Explications de Laurent Puech, fondateur de ce site ressources et formateur.
Laurent Puech
Selon vous, le rôle d'alerte du travailleur social, lié à son éthique, doit lui être reconnu...
La question de l'éthique déborde le cadre réglementaire ou légal dans les situations hors normes où les voies classiques d'expression prévues ne permettent pas d'obtenir une réponse rapide au regard des besoins. Or les textes actuels
ne permettent pas de protéger
un professionnel qui alerte
des dysfonctionnements entraînant
une maltraitance institutionnelle. Depuis 2002, les salariés des établissements relevant de l'article L. 312-1 du code
de l'action sociale et des familles qui sont témoins d'une maltraitance sur un usager sont protégés s'ils témoignent de ce qu'ils ont constaté, mais cette disposition
ne concerne pas les dysfonctionnements de structure conduisant à exposer
à un risque, voire à un danger, l'ensemble
du public accueilli. Depuis la loi sur
la protection de l'enfant de mars 2016,
en théorie, le conseil départemental doit informer sans délai le préfet de tout événement survenu dans
un établissement ou service qu'il autorise, dès lors qu'il est de nature
à compromettre la santé, la sécurité, l'intégrité ou le bien-être physique
ou moral des enfants accueillis.
Il n'est pas sûr que ce signalement sur
une structure qu'il finance soit la voie
la plus facile... L'immunité des travailleurs sociaux lanceurs d'alerte reste à créer.
Que préconisez-vous ?
Interpeller l'institution sur la place publique, sortir de ses murs pour peser
sur ses choix, renvoient à une proposition sur la protection de l'enfance que nous avions faite au sein de l'Association nationale des assistants de service social, en 2013, qui consistait à permettre
à un professionnel d'alerter directement
le défenseur des droits, sans accord préalable de la hiérarchie et sans craindre une sanction disciplinaire. L'enjeu est,
dans des cas exceptionnels, de donner
au travailleur social un pouvoir d'interpellation, en dehors de l'anonymat, celui-ci supposant que son geste n'est pas assumé, alors qu'il s'agit au contraire
de poser un acte professionnel.
Les travailleurs sociaux qui accompagnent les publics vulnérables doivent pouvoir dire à l'institution qu'elle est comptable
de ses choix.
En attendant, le professionnel s'expose à des risques...
Dans le secteur public ou privé, l'employeur a toujours plusieurs entrées possibles pour invoquer une faute,
dont l'obligation de réserve. Mais finalement, le vrai risque est de figer
dans le silence des professionnels qui ont des choses à dire sur le non-respect
des missions des institutions, surtout quand sont concernés des publics extrêmement fragilisés, quand est en jeu l'invisibilité des sans-voix. Lorsque l'on sait l'usure professionnelle vécue dans certains établissements, obliger les professionnels
à se taire rend encore plus difficile
la recherche du sens. Sans possibilité
de dénoncer, on les abîme encore plus,
il y a contamination de la maltraitance
du public vers celle des travailleurs sociaux.
Les interpellations collectives sont un autre moyen...
Face aux modes d'accueil et aux prises
en charge insatisfaisantes, des travailleurs sociaux quittent leur poste pour dénoncer après ce qu'ils ont pu constater pendant leur exercice professionnel. Faute
de trouver des réponses dans
leur institution, certains orientent
les mineurs non accompagnés vers
des associations de bénévoles,
ce qui peut être source de tension
avec l'établissement, alors que l'accompagnement vers l'accès aux droits fait justement partie de leurs missions.
Des collectifs se forment pour démasquer ce qui se cache parfois derrière les vitrines institutionnelles. Ce qui est sûr, c'est que des questions complexes comme la prise en charge des mineurs isolés font ressurgir la nécessité
de repenser notre rôle.
TSL est signataire de la pétition de soutien à l'éducatrice Ibtissam Bouchaara, salariée de la Sauvegarde de la Marne, qui a recueilli plus de 6 000 signatures.
Source : http://www.ash.tm.fr/actualites/detail/98262/laurent-puech-l-immunite-des-travailleurs-sociaux-lanceurs-d-alerte-reste-a-creer.html
Inscrivez-vous au blog
Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour
Rejoignez les 3542 autres membres