Après deux réformes successives en moins de 10 ans de la formation et du diplôme de technicien de l'intervention sociale et familiale, on peut légitimement supposer que les TISF d'aujourd'hui n'ont plus grand-chose à voir avec les "travailleuses familiales" d'antan. Mais qu'en est-il vraiment ? C'est la question à laquelle la DGCS a souhaité apporter une réponse, avec une étude réalisée sur la réalité du métier de TISF, sur son image, sur l'identité professionnelle de ceux qui l'exercent et enfin sur "le degré d'adéquation entre les attentes des employeurs et les profils des professionnels".
Des missions très précises
Cette analyse inaugure d'ailleurs "la démarche d'évaluation des effets de la réingénierie des diplômes qui sera appliquée à moyen terme à l'ensemble des diplômes de travail social", précise le rapport publié par la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), à l'issue du travail réalisé par le Groupe d'études sociales techniques et économiques (GESTE), notamment auprès des centres de formation. Très réglementé, le cadre d'intervention des TISF comporte "des missions précisément définies" auprès des familles, rappellent les auteurs de ce texte, en ajoutant qu'ils peuvent agir "dans différents secteurs, relevant de modes de financements différents" assurés par la CNAF, la CNAM, la Mutualité sociale agricole et les conseils généraux essentiellement.
Un rôle en protection de l'enfance
La réforme de la protection de l'enfance de 2007 a également ouvert "de nouvelles perspectives" pour l'action des TISF, les professionnels du travail social et éducatif étant désormais "plus impliqués dans la prévention, sous ses différentes formes" (périnatale, des difficultés éducatives des parents, médico-sociale en direction des enfants et des adolescents...). Elle a aussi permis de diversifier les formules d'accueil des enfants et créé de nouvelles modalités d'accompagnement des familles à domicile, "dont certaines s'appuient sur l'intervention d'un TISF", souligne le rapport du GESTE. Bref, cette réforme "souligne l'importance d'intervenir le plus en amont possible des difficultés familiales", les missions des TISF trouvant ainsi naturellement leur place dans ce dispositif. Concrètement, toutefois, "les statistiques dont on dispose sur les effectifs de TISF sont anciennes et/ou partielles", regrettent les auteurs de cette évaluation, en avançant des données dont ils jugent eux-mêmes qu'elles sont "à considérer avec précaution", et qui font état de 5 500 TISF en 1999 dans les seuls services d'aide à domicile, pour 4 095 en 2008, selon l'observatoire de la branche (BAD).
Un manque de reconnaissance
La réalité est sans doute aujourd'hui plus proche de 5 500, estime alors le Groupe d'études, qui aboutit, en incluant les autres secteurs, à un effectif global de 7 000 à 7 500 TISF fin 2008. Par ailleurs, si les métiers de l'aide à domicile (TISF et AVS en particulier) font officiellement partie des métiers du travail social, "il en va différemment sur le terrain".Car "les acteurs de terrain, que ce soit les financeurs, les responsables d'association ou les professionnels TISF eux-mêmes, distinguent, dans leur discours pour expliquer l'évolution du métier de TISF, les métiers qui relèvent de l'aide ménagère de ceux qui relèvent du travail social", rapportent les auteurs. D'où "une reconnaissance qui n'est pas encore acquise", comme travailleur social, de la part des autres métiers du secteur, dont certains représentants expriment même la crainte de voir les TISF empiéter sur leur champ d'activité, "le périmètre d'intervention des différents professionnels n'étant plus clairement défini à leurs yeux". Ainsi, malgré la réforme de la formation et du diplôme de technicien d'intervention sociale et familiale, "la capacité des TISF à s'inscrire autour d'un projet éducatif ou d'accompagnement, à travailler sur des objectifs dans un cadre pluridisciplinaire, à faire des observations et synthèses, à évaluer et à rendre compte par écrit de leurs actions doit sans cesse être réaffirmée".
Conforter la posture professionnelle
Outre cette "posture professionnelle à conforter", les TISF doivent aussi composer avec des conditions de travail parfois difficiles et qui, globalement, "se durcissent", sous le coup notamment de l'évolution des usagers, avec des situations familiales de plus en plus complexes et des publics plus fragiles. Or, parallèlement, "le nombre de familles prises en charge simultanément augmente et les horaires de travail se fractionnent". Le caractère de prestation payée de l'intervention des TISF rend d'ailleurs leur positionnement dans la famille tout aussi délicat, avec une difficulté à faire admettre leur rôle en tant qu'accompagnement éducatif. L'évolution de la formation est, enfin, toujours en cours, cette filière étant majoritairement intégrée soit à un pôle "aide à domicile" soit à un pôle "formations sociales". Mais "globalement, on constate une volonté de décloisonner les différentes formations", les TISF se retrouvant alors le plus souvent, pour les travaux communs, avec les assistants de service social ou les auxiliaires de vie sociale.
Un manque d'attractivité de la filière
Une tendance qui n'empêche pas ce diplôme de souffrir "d'un déficit d'attractivité", qui conduit plusieurs organismes de formation à enregistrer une baisse de leurs effectifs. Le plus frappant reste la baisse du nombre d'entrées effectives en formation des étudiants inscrits, relève le rapport, qui passe de 79 % en 2008 à 75 % en 2010. Au final, "près d'un quart des candidats acceptés lors de la sélection 2010 n'ont donc finalement pas intégré la formation TISF". Le manque d'attractivité du diplôme ne semble cependant pas imputable au marché du travail des TISF, qui se caractérise surtout "par de fortes disparités au niveau local", le nombre de diplômés répondant globalement aux besoins des employeurs, qui reconnaissent cependant que certains TISF restent sans emploi. Des perspectives d'évolution professionnelles pourraient enfin être creusées du côté de la validation des acquis de l'expérience (VAE), qui reste peu développée, de même que les passerelles entre métiers, alors que l'adaptabilité des TISF est reconnue.
Source : La lettre d'info du site ASH n°608
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